Stefan Myalonnier est un artiste autodidacte qui considère la pratique du dessin comme un langage à part entière lui permettant de partager ses états d’âme.
Jamais figuratifs, il aime jouer des formes abstraites aussi bien géométriques qu’organiques qu’il mixe en fonction de son humeur.
Le geste peut être maitrisé ou au contraire totalement libéré, peu importe tant qu’un équilibre visuel se met en place.
Ses premières œuvres dénommées « Études » l’ont amené à faire un cheminement vers l’élaboration de ce qu’il appelle « Compositions ».
Ses compositions graphiques, proches de la partition chorégraphique, font dialoguer à la fois dynamique gestuelle et contrainte structurelle.
La ligne fait place à la courbe et inversement.
Dans de tels agencements denses et colorés, il offre finalement des espaces de vie personnelle où le regard est amené à se balader, ou l’esprit peut se retrouver comme hypnotisé par l’omniprésence d’un mouvement en recherche constante de liberté.
La structure très construite de ses dessins est animée par une gamme chromatique riche en nuances qui reflète ses sentiments du moment.
Durant plus de 20 ans Stefan Myalonnier a développé une exploration avant tout personnelle du médium dessin en expérimentant de manière quotidienne et instinctive de nombreux supports et techniques picturales.
Ce temps de prospection et de gestation lui a permis de constituer progressivement son propre vocabulaire graphique et de créer une syntaxe singulière.
Il emploie justement le terme d’ « étude » pour nommer et regrouper ses différentes séries de dessins.
Fort d’un tel bagage, il affirme désormais une production plastique où ses oeuvres sont pour lui « une expression de soi libérée des codes et contraintes ».
Loin de toute volonté d’illustration, ou d’arrêter une figure au préalable, les formes se dessinent de manière organique entre apparition et disparition au fur et à mesure de ses gestes.
Le point laisse place à la ligne pour devenir forme et enfin se remplir de couleur.
Stefan Myalonnier procède toujours de la même manière.
Tout d’abord la pratique du dessin se fait chez lui, dans son espace intime.
La table est remplie de différents crayons, stylos, feutres et outils de traçage.
Il dispose ses fonds travaillés préalablement aux pigments.
Un format est alors arrêté et découpé.
Dès lors, de manière non préméditée, un premier geste au stylo donne naissance à une structure qui habite la feuille.
Il s’en suit une division successive de l’espace qui vient organiser la surface du papier dans un mouvement constant allant du macro au micro.
Les formes peuvent se répéter, se diviser, s’imbriquer, se déplier jusqu’à l’infinie parfois.
A l’instar d’agrégats, ces éléments graphiques vont se corréler les uns aux autres pour former progressivement un territoire qui va s’animer par le biais de la couleur.
Après une première phase de construction linéaire, l’ossature va être au fur et à mesure articulée et habitée par des gammes chromatiques intenses.
Un dialogue s’instaure alors entre ces couleurs où s’alternent contraste et adéquation pour mieux rythmer la composition graphique initiale.
Toujours dans un geste d’une grande précision avec un équilibre subtile entre les teintes et nuances, Stefan Myalonnier s’affaire à cette phase de coloriage de manière insatiable.
Bien que laborieuse, cette étape offre aussi un moment de non pensées, un temps de méditation que l’artiste apprécie plus que tout.
Il y a une certaine satisfaction à voir au fil du temps la feuille se recouvrir de couleur, tout comme de voir les pages restantes d’un livre diminuer au fur et à mesure de sa lecture.
Le dénouement reste toujours le même, une disparition inéluctable de toutes les zones blanches du papier.
Le dessin une fois achevé prend vie dans l’espace de la feuille.
Même si les limites du papier le cantonne à un certain format, on peut aisément l’imaginer s’étendre en dehors, dans les marges, et ce de manière infinie.
Il s’offre alors à une observation non univoque, ou l’absence de titre laisse la place libre à toute lecture possible.
C’est à chacun.e de s’en saisir.
Ces compostions graphiques sont pour l’artiste comme une réflexion en expansion dont le cheminement se fait par rebonds et échos aux rythmes des formes dessinées.
D’apparence à la fois simple et élaborée, ses dessins sont en quelque sorte une transcription visuelle, une matérialisation de la complexité de la pensée.
Dans une quête constante d’équilibre, chaque forme renferme un mouvement pour créer un mélange subtil de tensions.
Dès lors notre regard peut suivre ces labyrinthes de lignes et de courbes, glisser sur ces plages de couleurs ou sauter d’un point à un autre pour voyager ou même s’égarer comme ils nous arrivent de l’être quand nous sommes dans nos pensées.
2022 Benoît Billotte (artiste, médiateur)